traumatisme du genoux

Traumatisme du genou : diagnostic, prise en charge et prévention

L’essentiel en un coup d’œil :

  • Fréquence et vulnérabilité : Les traumatismes du genou touchent particulièrement les sportifs, les jeunes adultes et les enfants, représentant 37 % des blessures sportives.
  • Types de blessures : Entorses ligamentaires, lésions méniscales, fractures et luxations, chacune ayant des symptômes et traitements spécifiques.
  • Diagnostic précis : L’examen clinique, complété si nécessaire par l’IRM ou la radiographie, permet d’identifier la nature et la gravité du traumatisme.
  • Prise en charge adaptée : De la méthode PRICE (Protection, Repos, Ice, Compression, Élévation) aux traitements chirurgicaux pour les lésions graves, en passant par la kinésithérapie.
  • Prévention essentielle : Renforcement musculaire, techniques sportives adaptées, équipements spécifiques et échauffements permettent de limiter les risques de blessures.

Le saviez-vous ?

Ruptures ligamentaires, fractures ou simples contusions, les traumatismes du genou sont nombreux, et pas toujours évidents à reconnaître, les signes cliniques pouvant être sensiblement les mêmes d’une pathologie à l’autre.

Si la gonalgie touche surtout le sportif dans le cadre de ses activités physiques, n’importe qui peut se blesser au genou un jour ou l’autre, une chute ou un accident pouvant survenir à tout moment.

Heureusement, dans la plupart des cas, le traumatisme est sans gravité, et relève de la simple contusion.

En revanche, il peut être plus sérieux, et impacter le quotidien du blessé, notamment quand il n’est pas correctement identifié et traité.

Mais, qu’elle soit bégnine ou plus grave, la blessure doit rapidement être évaluée pour débuter la prise en charge, le plus précocement possible, et ainsi éviter les complications fonctionnelles durables.

Et, c’est à vous, en tant que médecin généraliste, que revient généralement la charge d’évaluer la blessure, dans sa phase aiguë.

En effet, c’est souvent l’examen clinique initial que vous réalisez, qui permet non seulement de classer la gravité, la nature et le type de lésions dont souffre votre patient, mais aussi de choisir avec discernement l’examen complémentaire à réaliser, en cas de doute.

Alors, comment diagnostiquer avec précision la lésion de votre patient ? Quels examens prescrire ? Et, comment prendre en charge efficacement votre blessé du genou ?

C’est ce que nous verrons ci-après.

Les principales lésions traumatiques du genou :

Rappel anatomique :

Le genou est l’articulation située entre le fémur et le tibia.

Des couches de cartilage (ménisques) amortissent les chocs dans le genou.

Et, quatre ligaments assurent sa stabilité :

  • Les ligaments latérauxinternes (LLI) et externes (LLE), situés de part et d’autre du genou, qui l’empêchent de trop bouger d’un côté à l’
  • Les ligaments croisésantérieurs (LCA) et postérieurs (LCP), qui empêchent le genou de trop bouger en avant ou en arrière.

Ce sont ces structures qui sont le plus souvent lésées lors des chocs au genou.

  1. Entorses ligamentaires :

L’entorse du genou est essentiellement due à un traumatisme indirect (mouvement anormal de la jambe, torsion, hyperextension).

Mais, elle peut aussi être causée par un traumatisme direct (choc ou chute sur le genou, accident domestique ou du travail …).

Les principales atteintes ligamentaires sont l’étirement, et la rupture (partielle ou complète). Elles peuvent être bénignes, modérées ou sévères. Le LLI et le LCA sont le plus souvent touchés.

Elles affectent surtout le sportif, qui pratique les sports pivots avec ou sans contact (football, rugby, handball, basketball…) ou le skieur, considérés comme profils à risque.

 

  1. Lésions méniscales traumatiques :

Dans le cas des lésions méniscales, on observe des douleurs mécaniques, un blocage articulaire, et un épanchement.

 

  1. Fractures associées :
     

Les fractures les plus fréquemment rencontrées sont la fracture de Segond, et celles du plateau tibial et de la rotule.

 

  1. Contusions osseuses et lésions cartilagineuses :

Il s’agit principalement de contusions simples, d’hématomes sous-périostés, de microfissures ou de tassements osseux.

 

  1. Luxations patellaires ou tibiofémorales:

Si elles sont exceptionnelles, ces pathologies relèvent de l’urgence.

Conduite à tenir immédiate en cas de traumatisme du genou :

  1. Protocole GREC (Glace – Repos – Élévation – Compression)

Le protocole GREC est surtout indiqué en phase aiguë, c’est-à-dire dans les suites immédiates de la blessure, pour réduire la douleur et l’inflammation.

  1. Immobilisation :

En cas de forte douleur, on peut recourir à l’immobilisation de la jambe avec une attelle ou un dispositif dédié, mais aussi en cas d’instabilité du genou ou de suspicion de lésion grave.

 

  1. Appui :

En règle générale, l’appui est autorisé en cas de blessures légères à modérées, si la douleur est supportable et si le genou est stable.

 

  1. L’antalgie :

Le recours aux antalgiques ou aux AINS dépend du contexte médical.

 

  1. Consultation médicale :

 

Sauf urgence (déboitement, instabilité), elle doit avoir lieu dans les 48 heures suivant le traumatisme du genou.

Symptômes et examen clinique : savoir orienter le diagnostic

Signes évocateurs :

Certains signes particulièrement évocateurs vous permettent d’orienter votre diagnostic :

  • Douleur aiguë, craquement ou claquement audible, sensation de déboîtement.
  • Instabilité à la marche ou à l’appui.
  • Gonflement rapide (hémarthrose → suspicion LCA ou lésion intra-articulaire)
  • Blocage, limitation de l’amplitude, épanchement.

 

Examen clinique :

L’examen clinique vous permet d’évaluer le degré de gravité de la blessure et d’établir la conduite à tenir : examens à réaliser, traitement à prescrire, suivi, orientation, coordination …

L’interrogatoire que vous menez vous permet de recueillir les antécédents (blessures), et de déterminer la localisation de la douleur, les circonstances de survenue ou le mécanisme de torsion…

L’inspection vous permet de déceler les signes associés : craquement, œdème, épanchement, hématome, posture antalgique …

À noter que la douleur étant une notion subjective, sa présence ou son absence n’est pas toujours spécifique.

Enfin, différents tests vous permettent d’affiner ou d’orienter votre diagnostic.

Les plus importants sont :

 

Les tests ligamentaires :

Le test de Lachman : il s’agit de tirer doucement sur le tibia tout en maintenant le fémur en place : un mouvement excessif est évocateur d’une lésion du LCA.

Le test dit du « tiroir » : il consiste à tirer le tibia vers l’avant tout en maintenant le fémur immobile. Une entorse est suspectée en cas de translation excessive.

Le test de pivot shift : il s’agit de faire pivoter le tibia tout en appliquant une pression, pour rechercher des mouvements anormaux. Ce test permet d’évaluer la stabilité du genou et de s’assurer que le LCA est intègre.

Le test de valgus (abduction) : il consiste à appliquer une pression latérale sur le genou fléchi, à la recherche d’une ouverture sur le côté médial. Il permet d’évaluer l’intégrité du LLI.

Le test de varus (adduction) : il consiste à appliquer une pression médiale pour vérifier la stabilité du genou. Il évalue l’intégralité du LLE.

 

Les autres tests :

Le Test de McMurray est utile pour rechercher une lésion méniscale, repérable par une douleur au niveau du ménisque médial ou latéral, et un « cliquetis » audible lors de la manipulation du genou

Le Test de Thessaly permet de rechercher un signe de blocage ou une douleur évocatrice d’une possible lésion méniscale. Pour cela, votre patient se tient sur une jambe, fléchit légèrement le genou et effectue une rotation.

Le Test de Grind (ou test de compression du ménisque) : il consiste à appliquer une pression sur le genou fléchi tout en le déplaçant, pour rechercher une douleur évocatrice d’une une lésion méniscale.

Le Test de patella (ou test de compression de la rotule) : il consiste à comprimer la rotule vers le bas à la recherche d’une douleur.

Examens complémentaires :

Les examens d’imagerie confirment le diagnostic et évaluent l’étendue des blessures. 

  1. Radiographies standards :

Elles permettent de déceler ou d’exclure les arrachements osseux, les fractures ou une luxation associée.

  1. IRM (examen clé) :

L’IRM n’est pas l’examen de première intention, mais c’est l’examen de référence en cas de suspicion de lésions graves telles que :

  • Les ruptures ligamentaires (LCA),
  • Les lésions des ménisques,
  • Les contusions osseuses et cartilagineuses.

 

Elle est également recommandée en cas de persistance des symptômes plusieurs jours après la mise en place du protocole PRICE (protection, repos, glaçage, compression, élévation).

 

  1. Échographie (cas ciblés)

Elle permet d’évaluer les tissus mous et les ligaments, et est surtout utile pour détecter les épanchements et les tendinopathies associées.

 

Récapitulatif : 

 

Absences de signes de gravité :

Signes de gravité :

Exemples :

Contusion simple.

 

Étirement ligamentaire.

Rupture ligamentaire : entorse grave, rupture du LCA.

 

Lésion méniscale.

 

Luxation de la rotule réduite spontanément.

 

Fracture du genou.

 

Fractures ou lésions des extenseurs associées à l’entorse du genou.

Mécanisme et signes :

Chute directe sur le genou.

 

Absence d’hémarthrose.

 

Douleur supportable.

 

Appui possible.

Torsion brutale du genou sur un changement de direction (handball), une mauvaise réception (basket), ou un tacle (football).

 

Craquement audible, douleur, épanchement mécanique, instabilité et lâchage du genou.

 

Impotence fonctionnelle post-traumatique.

 

Hémarthrose.

 

Blocage (déchirure méniscale).

Examens :

Examen clinique : inspection, palpation, tests.

 

 

 

Examen clinique.

 

Radio standard devant une hémarthrose.


Après la phase aiguë, et en l’absence de signe de fracture :

IRM pour bilan méniscal, dans les 15 jours suivant la blessure.

Traitement :

Protocole PRICE : protection de la blessure, Repos de l’articulation, compression élastique, glaçage, et surélévation de la jambe pour limiter l’œdème.

 

Antalgique simple sur quelques jours, si besoin.

 

Attelle si besoin, les premiers jours.

 

Éventuellement, béquilles avec appui progressif pour conserver un bon déroulé du pas, et éviter les conséquences de l’immobilisation prolongée.

 

Exercices de mobilisation et de renforcement, le plus tôt possible.

 

Consulter en l’absence d’évolution favorable.

 

 

Cryothérapie.

 

Attelle à visée antalgique.

Dispositif d’immobilisation pour les entorses sévères.

 

Puis, consultation médicale pour examen clinique dans les 48h.

 

Appui avec béquilles 8/15 jours.

 

Poursuite de l’attelle à visée antalgique et du glaçage.

 

Arrêt du sport en fonction de la gravité des lésions : 4 à 6 semaines minimum (réparation tissulaire).

 

Chirurgie/arthroscopie dans les 48-72h si fracture : fracture articulaire du tibia, fémur, rotule, arrachement du pied du LCA (épines tibiales).

 

 

Prise en charge initiale en médecine générale :

Entorses bénignes à modérées :

La prise en charge initiale est axée sur :

  • Le repos, le glaçage régulier, et les antalgiques.
  • L’attelle fonctionnelle, entre 8 à 15 jours selon les cas.
  • La prescription d’une prise en charge précoce en kinésithérapie : travail d’amplitude, proprioception, renforcement musculaire.

 

Suspicion de rupture ligamentaire / méniscale grave :

En cas de lésions plus sévères, les recommandations sont les suivantes :

  • L’immobilisation.
  • L’IRM à réaliser rapidement.
  • L’orientation vers un spécialiste (orthopédiste / médecin du sport).

 

Cas particulier :

En cas de suspicion de fracture ou de luxation → urgences

Rééducation et prévention des complications :

  1. Importance du travail kinésithérapique dès la phase subaiguë :

La prise en charge kinésithérapique est essentielle.

Elle doit débuter dès la phase subaiguë.

Elle permet de récupérer l’amplitude, de renforcer les muscles et de travailler la proprioception.

Les principaux risques à éviter sont le flessum, l’instabilité chronique et la perte fonctionnelle.

 

  1. Éducation thérapeutique du patient :

L’éducation thérapeutique est une étape essentielle du programme de soins.

Elle permet d’informer le patient sur les risques, les signes de récidive et d’aggravation, et de lui apporter une conduite à tenir quand ils se présentent.

Elle engage le blessé à respecter les consignes : reprise progressive des activités, respect des temps de récupération, surveillance de la douleur …

Et, nous savons que l’une des clés de succès de la prise en charge est la participation active du patient.

 

  1. Suivi à moyen terme :

Enfin, rien ne serait possible sans le suivi régulier que vous mettez en place et qui inclut :

  • Un contrôle médical à 3-6 semaines.
  • Une réévaluation de la stabilité et de la récupération fonctionnelle.
  • Un renouvellement ou une adaptation du protocole de rééducation, si besoin.

Quand envisager une chirurgie ?

La chirurgie peut être envisagée en présence d’une :

  • Rupture complète du LCA chez un patient jeune ou sportif.
  • Lésion méniscale symptomatique (blocage articulaire, douleurs mécaniques).
  • Instabilité persistante malgré une rééducation bien conduite.

Dans ce cas, vous initiez une coordination avec une équipe spécialisée : orthopédiste, médecin du sport, kinésithérapeute …

Prévention des traumatismes du genou :

  1. En amont :

Pour prévenir les blessures de genou, vous pouvez proposer d’intégrer un programme préventif qui inclut un :

  • Échauffement structuré (ex : programme FIFA 11+).
  • Renforcement quadriceps / ischio-jambiers /
  • Travail d’équilibre et proprioception.

 

  1. Technique sportive :

Un travail dédié à la technique sportive peut également être intégré :

  • Apprentissage des gestes à risque (réceptions, pivot).
  • Correction posturale et gestuelle (entraînement supervisé).

 

  1. Matériel et environnement :

Enfin, on peut agir sur les causes extrinsèques : écoute du corps, respect des temps de repos, surfaces de jeu et chaussures adaptées …

Pour conclure...

En tant que médecin généraliste, vous êtes régulièrement amené à prendre en charge des entorses du genou.

Si en règle générale, le repos, la cryothérapie et des antalgiques suffisent à agir sur la douleur, dans les cas plus graves, une orientation et une coordination avec équipe spécialisée et/ou une intervention chirurgicale sont nécessaires.

C’est votre examen clinique initial et les tests que vous réalisez, qui déterminent la nature, le type, la gravité de la lésion, et la conduite à tenir.

Maîtriser les tests cliniques est donc primordial pour ne pas passer à côté du diagnostic.

Alors, si vous êtes intéressé par ce type de prise en charge ou si vous souhaitez réactualiser vos connaissances et maîtriser les outils diagnostiques, n’hésitez pas à vous inscrire à l’une de nos actions de formation dédiées aux sportifs.

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Sources : 

HAS

NeuroXtrain

Science directe.com