Vaccination contre la coqueluche pendant la grossesse : recommandations, efficacité et mise en pratique

L’essentiel en un coup d’œil :

  • Risque élevé pour les nourrissons : La coqueluche est une maladie bactérienne grave, surtout avant 3 mois, pouvant entraîner hospitalisation, complications respiratoires, voire décès.

  • Vaccination maternelle efficace : Réalisée entre 20 et 36 SA, elle protège le nouveau-né par transfert d’anticorps (immunité passive), réduisant jusqu’à 95 % les formes graves.

  • Vaccin recommandé à chaque grossesse : Indépendamment du statut vaccinal antérieur. Boostrixtetra® et Repevax® sont les vaccins utilisés.

  • Stratégie cocooning en complément : Vacciner les proches du nourrisson si leur dernier rappel date de plus de 5 ans, surtout si la mère n’a pas été vaccinée.

  • Rôle clé du médecin généraliste : Intégrer systématiquement la vaccination dans le suivi prénatal, rassurer les patientes et assurer la coordination avec l’équipe périnatale.

Le saviez-vous ?

La coqueluche a longtemps été synonyme de mortalité infantile.

À partir des années 60, la vaccination a permis de réduire considérablement le nombre de décès qu’elle causait. Et, jusqu’à il y a peu, elle suffisait à contenir cette infection respiratoire hautement contagieuse.

Mais, si la vaccination est efficace, l’immunité qu’elle induit ne protège qu’une dizaine d’années. Et, contrairement aux autres maladies infantiles, la coqueluche, elle, peut être contractée plusieurs fois au cours d’une vie.

Des doses de rappel sont donc recommandées à intervalle régulier.

Par ailleurs, les bactéries qui la causent continuent de circuler, et certaines souches deviennent résistantes aux antibiotiques, dont les macrolides, que l’on prescrit en première intention pour lutter contre la coqueluche.

En France, elle provoque des pics épidémiques tous les 3 à 5 ans : le dernier a eu lieu courant 2024.

Vos consultations de médecine générale ont d’ailleurs permis de confirmer 134 639 cas de coqueluche, l’an dernier.

Si chez l’adulte, elle provoque des quintes de toux parfois compliquées, ses conséquences sont encore plus dramatiques et parfois mortelles chez le malade vulnérable, et plus particulièrement le nourrisson, première victime de la coqueluche.

Face à cette recrudescence de cas, il est impératif d’informer et de sensibiliser les futures mamans aux mesures préventives à adopter, dont la vaccination, seul moyen véritablement efficace pour protéger leur enfant à naître.

Alors, quelles sont les recommandations actuelles, et comment pouvez-vous aider la femme enceinte et son nourrisson ?

C’est ce que nous verrons ci-après.

Rappels cliniques sur la coqueluche néonatale :

La coqueluche :

La coqueluche, c’est 40 millions de cas et 300 000 décès, chaque année, dans le monde.

Une personne en contamine en moyenne 15 autres.

Elle est due aux bactéries Bordetella pertussis et Bordetella parapertussis.

Elle se transmet par voie aérienne.

Quand elle est traitée, la coqueluche est contagieuse entre 3 et 5 jours selon l’antibiotique prescrit.

En revanche, quand elle n’est pas traitée, elle est fortement contagieuse la première semaine, puis la contagiosité diminue progressivement les 15 jours qui suivent, et devient nulle.

L’antibiotique de première intention est le macrolide, mais certaines souches y deviennent déjà résistantes.

La coqueluche n’est pas une maladie à déclaration obligatoire sauf s’il s’agit d’une infection nosocomiale ou en cas de clusters, qu’ils soient intrafamiliaux ou qu’ils touchent une collectivité (crèche…).

 

Risques chez le nourrisson :

La coqueluche est particulièrement dangereuse pour les nourrissons de moins de 12 mois, notamment ceux âgés de 3 à 6 mois, pas encore ou partiellement vaccinés, et dont le système immunitaire est immature.

Ils sont considérés comme à haut risque de développer une forme grave de la maladie.

Les principaux risques encourus sont :

  • La déshydratation et la dénutrition.
  • Les complications respiratoires: quintes de toux sévères et/ou asphyxiantes, dyspnée, apnée, pneumonie, détresse respiratoire avec bradycardie et cyanose.
  • Les complications neurologiques: crises convulsives, encéphalites.
  • La défaillance multiviscérale.
  • Le décès, dans les cas extrêmes.

Pourquoi vacciner pendant la grossesse ?

Une femme enceinte atteinte de coqueluche ne transmet pas la maladie au fœtus.

En revanche, si la maladie survient en fin de grossesse, la mère peut contaminer son bébé juste après sa naissance, par voie respiratoire.

Dans ce cas, il est primordial de détecter et traiter précocement la maman, et de mettre en place les gestes barrières.

Si le nourrisson est âgé de moins de 3 mois, l’hospitalisation est systématique.

La vaccination maternelle réduirait les risques de 70 à 95%.

Mais, elle ne protège pas à vie. Les femmes enceintes doivent donc se faire vacciner régulièrement, et à chaque grossesse, conformément aux recommandations en vigueur.


Immunité passive du nouveau-né :

Nous l’avons vu plus haut, la vaccination maternelle, réalisée entre la 20e et la 36e semaine d’aménorrhée (SA), permet d’améliorer le transfert transplacentaire d’anticorps maternels (IgG).

L’efficacité maximale est obtenue après la 28e SA.

Cette immunité passive du nouveau-né lui offre une protection optimale avant de pouvoir être lui-même vacciné.

Réduction avérée des formes graves de coqueluche :

La vaccination permet de protéger des formes graves et mortelles de la maladie, et prévient l’hospitalisation du nourrisson 9 fois sur 10.

C’est en tout le constat qui est fait dans les pays où la couverture vaccinale est largement atteinte.

Protection indirecte :

Enfin, elle limite la transmission de l’infection de la mère vers le nouveau-né dans le post-partum immediat.

Recommandations officielles et vaccin utilisé :

En 2024, Santé Publique France a estimé à 62,3% le taux de vaccination chez les femmes enceintes, avec des inégalités territoriales : la couverture vaccinale est à plus de 80% dans certaines régions du Nord-Ouest, et chute à moins de 30% dans certaines régions de Sud-Est et de l’Outre-Mer.
 

Vaccin recommandé :

Le vaccin actuel ne contient que des antigènes immunisants : c’est ce qu’on appelle un vaccin acellulaire.

Les doses d’antigènes coquelucheux étant réduites pour que le vaccin soit mieux toléré par la femme enceinte, les effets indésirables sont minimes, et la sécurité, maximale.

En France, il est combiné à d’autres vaccins, et plus particulièrement au DTP.

On le trouve sous l’appellation DTPa pour Diphtérie, Tétanos, Poliomyélite, coqueluche Acellulaire.

Les deux vaccins actuellement recommandés aux femmes enceintes sont Boostrixtetra® ou Repevax®.

 

Population ciblée :

Toutes les femmes enceintes doivent être vaccinées, à chaque grossesse, et ce quel que soit leur statut vaccinal antérieur.

 

Moment optimal :

La vaccination maternelle doit être réalisée :

  • Entre la 20e et la 36e semaine d’aménorrhée
  • Idéalement au début du 2e trimestre de grossesse
  • Avant la sortie de la maternité.

Mise en œuvre en consultation - Récapitulatif

Schéma vaccinal chez le nourrisson : 

  • Primovaccination à deux injections à deux mois d’intervalle, c’est-à-dire à l’âge de 2 mois (8 semaines) et 4 mois.
  • Rappels à l’âge de 11 mois, 6 ans, puis 11-13 ans.

Le prochain rappel sera ensuite programmé à l’âge de 25 ans (avec possibilité de rattrapage jusqu’à l’âge de 39 ans).

Rappels dans le cadre de la stratégie de cocooning :

 En l’absence de vaccination de la mère pendant la grossesse, il est recommandé de la vacciner dans le post-partum immédiat, avant la sortie de la maternité.

La HAS recommande de vacciner l’entourage proche du nourrisson, si possible avant la naissance pour réduire le risque de transmission :

  • Si leur dernier vaccin date de plus de 5 ans, et
  • Si la maman n’a pas été vaccinée avent le 8e mois de grossesse.

C’est ce qu’on appelle la stratégie cocooning.

D’après Santé Publique France, la transmission se fait par l’entourage adulte non vacciné, dans 70% des cas.

Éléments de recommandation :

 

Sécurité et effets secondaires potentiels :

Sécurité :

Le vaccin contre la coqueluche n’a ni augmenté le risque de fausse couche, ni induit d’anomalie fœtale.

C’est l’un des vaccins les plus sûrs.

 

Effets indésirables :

Certains effets indésirables sans gravité ont été rapportés, tels que des myalgies, des céphalées, une rougeur locale, ou une légère fièvre.

Et, en cas d’allaitement ?

La vaccination contre la coqueluche est compatible avec la grossesse et l’allaitement.

Situations particulières à prendre en compte :

Les principales particularités dont il faut tenir compte sont :

→ La femme vaccinée récemment, hors grossesse : le rappel est recommandé à chaque grossesse, indépendamment du délai.

→ La femme enceinte non vaccinée pendant la grossesse, et après l’accouchement : La vaccination dans le post-partum immédiat est possible pour protéger les prochaines expositions.

En revanche, un antécédent de réaction allergique grave à une dose antérieure de vaccin DTPa contre-indique toute nouvelle vaccination.

Points de vigilance en pratique clinique :

Traçabilité et documentation de la vaccination :

Vous informez votre patiente oralement du but de la vaccination, de ses réactions indésirables potentielles, et de la conduite à tenir en pareil cas puis, vous recueillez son consentement.

Une fois le vaccin administré, vous consignez l’acte dans le carnet de grossesse et le DMP (date, numéro de lot, site d’injection…).

 

Suivi vaccinal :

Vous intégrez le suivi vaccinal, y compris celui de l’entourage, au suivi de la grossesse de votre patiente, pour respecter la stratégie cocooning.

La stratégie cocon, un complément toujours utile :

Qui vacciner ?

L’entourage proche du nourrisson âgé de moins de 6 mois : le papa, la fratrie, les grands-parents, mais aussi toutes les personnes et tous les professionnels en contact avec le bébé.

Quand ?

Au moins 1 mois avant la naissance avec le DTPa si le rappel date de > 5 ans.

Qui mobiliser ?

Tous les professionnels de santé : médecin généraliste, pédiatre, sages-femmes, PMI, infirmiers…

Rôle du médecin et des professionnels de santé :

À l’instar des autres professionnels de santé, en tant que médecin généraliste en charge du suivi de la femme enceinte, vous devez vous engager dans le programme de vaccination contre la coqueluche, afin de protéger la vie de l’enfant à naître.

Dès lors, vous devez informer, rassurer et intégrer la vaccination dans le parcours de soins, dès le début du suivi de la grossesse (historique vaccinal, vaccination du partenaire de vie…).

Si la future maman est effrayée par la vaccination ou hésitante, rappelez-lui que la vaccination protège son bébé dès sa naissance, et que cette protection est essentielle parce que son immunité ne lui permet pas de combattre la bactérie.

Enfin, n’hésitez pas à initier une coordination avec les sages-femmes et les services de maternité, si besoin.

Éducation et perception des femmes enceintes :

Freins fréquents :

Les principaux freins sont la crainte des effets secondaires ou le sentiment que la vaccination ne concerne pas la grossesse.

 

Leviers efficaces :

Le principal levier d’action est le discours centré sur la protection du bébé.

Mais, vous pouvez également vous appuyer sur les recommandations médicales fortes, et sur la simplification de l’accès à la vaccination.

 

Outils utiles :

Pour cela, vous disposez de différents outils, tels que les :

  • Fiches Info HAS.
  • Campagnes “Protéger Bébé” de Santé Publique France.
  • Affiches que vous mettez à disposition des parents en salle d’

Pour conclure...

Nous l’avons vu, la coqueluche est une infection bactérienne particulièrement grave chez le nourrisson, notamment avant l’âge de 3 mois.

La vaccination maternelle est le moyen le plus efficace de prévenir les formes graves, et les décès prématurés du nourrisson.

Pourtant, elle est encore insuffisante, puisque moins des 2/3 des femmes enceintes se font vacciner.

En tant que médecin généraliste, vous avez un a un rôle crucial à jouer pour intégrer ce réflexe vaccinal dans le suivi prénatal, et faire respecter les recommandations, et plus encore en période d’épidémie.

Pour cela, vous devez sensibiliser systématiquement vos patientes, dès le début du parcours de grossesse, et vous engager pleinement pour que la couverture vaccinale atteigne le seuil optimal.

Pour conclure, que pensez-vous de cette recrudescence de cas de coqueluche ?

Quelles sont les principales difficultés que vous rencontrez lors des recommandations vaccinales faites aux femmes enceintes ?
Avez-vous des conseils à donner à vos collègues, moins aguerris ?

Enfin, si vous avez trouvé cet article utile, partagez-le autour de vous.

Pour en savoir plus, n’hésitez pas à consulter notre catalogue de formations DPC.

Sources : 

Santé Publique France

Vaccination Info Service

HAS

Ameli

Inserm