L’essentiel en un coup d’œil :
- Définition des lésions cutanées : Altérations de la peau ou des tissus sous-cutanés, classées en lésions bénignes, suspectes ou malignes.
- Types de lésions : Primaires (ex. macules, papules) ou secondaires (ex. croûtes, ulcères), souvent coexistant dans des dermatoses complexes.
- Critères de gravité : La règle ABCDE (Asymétrie, Bords, Couleurs, Diamètre, Évolution) permet de distinguer les lésions malignes.
- Causes variées : Infections, inflammations, allergies, traumatismes ou maladies systémiques.
- Prise en charge et prévention : Diagnostic précis, traitements adaptés (topiques, médicamenteux ou chirurgicaux) et éducation des patients pour éviter les complications.
Le saviez-vous ?
Les lésions cutanées sont l’un des premiers motifs de consultation en dermatologie.
Pourtant, savoir les identifier avec certitude, pour les prendre en charge précocement et correctement, n’est pas toujours chose aisée tant les frontières pour les distinguer sont parfois minces.
Nodules, macules, vésicules, ou encore papules et pustules, vous en avez déjà tous entendu parler, vous connaissez leurs principales caractéristiques, et pourtant, parfois, vous pouvez hésiter à poser votre diagnostic surtout quand différents types de lésions cohabitent.
Je vous propose donc de refaire un point sur les différentes lésions, afin de vous aider à les identifier avec précision, et les prendre en charge conformément aux recommandations en vigueur.
Définition et classification des lésions cutanées :
Définition médicale :
Une lésion cutanée est une altération de la peau ou des tissus sous-cutanés, survenant sur tout ou partie du corps : visage, bras ou dos par exemple.
Quand elle est saine, la surface de la peau est lisse, et son microrelief, fait d’élevures et de dépressions, est visible.
Quand elle est altérée, la surface de la peau peut être :
– épaissie, comme dans le cas d’une kératose,
– amincie : en cas d’atrophie épidermique par exemple,
– absente : dans l’érosion, la fissure ou l’ulcération,
– modifiée et/ou remplacée par un élément inhabituel comme dans les cas de squames, nécroses, ou croûtes.
Les lésions cutanées sont visibles, palpables, de forme, de taille et de gravité variables.
On distingue trois grands types de lésions cutanées selon leur gravité : les lésions bénignes, suspectes et malignes.
Les lésions cutanées bénignes :
Elles sont généralement sans gravité, et sont surtout inesthétiques ou inconfortables, notamment quand elles sont associées à des frottements et à de l’irritation.
Les lésions cutanées suspectes :
Ce sont des lésions que l’on ne peut pas considérer comme malignes ou bénignes de prime abord, et qui nécessitent une biopsie pour confirmation du diagnostic.
Les lésions cutanées malignes :
En règle générale, ce sont des cancers de la peau.
Classification simplifiée pour la pratique clinique :
Dans la pratique clinique, on répertorie surtout les lésions selon qu’elles sont primaires ou secondaires.
Les lésions primaires :
Ce sont celles qui sont directement liées à un processus pathologique (macules, papules, vésicules).
Les lésions secondaires :
Elles peuvent faire suite aux lésions primaires ou être dues à des facteurs externes (ulcères, croûtes, cicatrices).
Lésions primaires :
| Lésions secondaires : |
Les macules :
– Macules rouges : érythème, macules vasculaires, purpura.
– Macules pigmentaires : chloasma, tâches café-au-lait, mélanodermie de la maladie d’Addison…
– Macules achromiques : albinisme, tumeur scléreuse de Bourneville, pityriasis versicolor…
| Les croûtes :
Évolution des lésions élémentaires primitives (bulles, vésicules, pustules…)
Exemple : impétigo. |
Les squames :
– Squames pityriasiformes – Squames ichtyosiformes – Squames scarlatiniformes – Squames psoriasiformes – Squames folliculaires.
| Les cicatrices pathologiques :
– Cicatrices hypertrophiques – Cicatrices chéloïdiennes |
Les kératoses :
Ou hyperkératoses. | L’atrophie et la sclérose :
– Atrophie épidermique, dermique ou hypodermique. Exemple : lupus érythémateux.
– Sclérose : sclérodermie, dermo-hypodermite sclérodermiforme… |
Les lésions liquidiennes :
– Vésicules (varicelle, eczéma…).
– Bulles (pemphigoïde bulleuse, épidermolyse bulleuse acquise…).
– Pustules (folliculite bactérienne, psoriasis pustuleux, maladie de Behçet…). | Les pertes de substances :
– Érosion (exulcération) – Ulcération – Ulcère (vasculaire le plus souvent) – Fissure – Mal-perforant (plantaire) – Gangrène – Escarre – Chancre. |
Les lésions infiltrées :
– Papules : épidermiques (verrues planes), dermiques (papules de prurigo, lichen plan…), folliculaires ou miliaires.
– Nodules (nouures de l’érythème noueux).
– Végétations. | Les tumeurs cutanées :
Elles peuvent toucher :
– L’épiderme : carcinome, mélanome…
– Les éléments du derme : fibroblastes, vaisseaux, nerfs …
– Les cellules inhabituellement présentes dans la peu : métastases, lymphome… |
En pratique la distinction entre lésion primitive et secondaire n’est pas toujours simple, d’autant plus que beaucoup de dermatoses présentent plusieurs lésions élémentaires, comme c’est le cas :
- Du psoriasis où l’érythème et les squames sont associés,
- De l’urticaire qui fait cohabiter œdème et érythème,
- De l’eczéma qui peut associer œdème, croûtes, suintement, érythème, lichénification…
Identification des lésions cutanées : approche diagnostic
L’interrogatoire :
L’interrogatoire doit être minutieux :
- date d’apparition de la lésion,
- contexte,
- évolution,
- signes généraux, locaux et fonctionnels associés (prurit, fièvre, douleur, brûlure…),
- médicaments en cours et/ou récemment pris,
- antécédents médicaux, chirurgicaux, familiaux,
- facteurs de risque,
- dernier bilan sanguin,
- environnement professionnel,
- voyages récents, etc.
Observation clinique :
Outre l’interrogatoire, l’identification des lésions cutanées repose aussi sur l’observation clinique des lésions : localisation, taille, couleur, relief, évolution dans le temps.
Elle doit être systématique.
Critères clés pour différencier lésions bénignes et malignes :
Afin de mesurer la gravité de la lésion, plusieurs critères déterminants doivent être évalués. Ils sont regroupés dans la règle ABCDE qui permet de reconnaître les signes d’alerte :
- A pour Asymétrique,
- B pour Bords irréguliers,
- C pour Couleurs différentes,
- D pour Diamètre qui s’élargit, et
- E pour Évolution rapide.
L’asymétrie de la lésion, ses contours irréguliers, un changement rapide de sa taille, de sa couleur et de son aspect plaident pour un caractère malin. Devant ces critères, la consultation médicale est indispensable.
Caractéristiques des principales lésions :
Types de lésions : | Caractéristiques : | Exemples : | Photos : |
Macules : | Lésions planes, non palpables, sans infiltration. Ce sont des taches dyschromiques. La couleur et la texture de la peau changent. Diamètre < 10 mm. | Taches de rousseur, Naevus plats, Angiomes plans « lie de vin », Éruptions de la rubéole, de la rougeole ou des infections à rickettsie…. | |
Squames : | Lésions palpables et visibles. – Squames pityriasiformes : fines, blanches, de petite taille, sèches (dartre) ou grasses (visage). – Squames psoriasiformes : blanches, brillantes, épaisses, de taille variable, effritement en lamelle typique (signe de la bougie). – Squames folliculaires : squames de petites tailles, en semis, localisées à l’émergence d’un poil. | Psoriasis, Dermite séborrhéique, Infections mycosiques, Pityriasis rosé, Dermatoses chroniques… | |
Papules : | Lésions palpables, surélevées, solides, circonscrites, rondes, ovales, polygonales ou ombiliquées. Diamètre < 10 mm. | Naevus, Verrues, Lichen plan, Piqûres d’insectes, Kératoses séborrhéiques et actiniques… | |
Plaques : | Lésions palpables, surélevées ou déprimées, plates ou arrondies, d’un diamètre > 10 mm. Parfois recouvertes de squames épaisses, argentées et brillantes, comme dans le psoriasis. | Psoriasis, Granule annulaire… | |
Nodules : | Lésions visibles et palpables : élevures plus ou moins saillantes, rondes ou ovales, plutôt de grande taille (> 1 cm). À la palpation, les nodules sont fermes, solides et infiltrés. La couleur est peu marquée, parfois rouge vive voire purpurique. Ils peuvent être réactionnels, infectieux ou tumoraux. | Kystes Lipomes Fibromes Nouures | |
Vésicules : | Petites lésions visibles et palpables, en relief, translucides, hémisphériques, coniques ou ombiliquées, de petite taille 1 à 2 mm de diamètre. Les sérosités sont claires. Les petites collections se situent sur une peau saine (varicelle) ou érythémateuse (eczéma). | Spongiose : eczéma Nécrose kératinocytaire : Herpès, varicelle, zona… | |
Bulles : | Lésions visibles et palpables, en relief, de taille variable (5 mm à plusieurs centimètres), contenant un liquide clair, jaunâtre ou hémorragique. Elles siègent sur une peau saine ou érythémateuse, et parfois sur les muqueuses externes (bouche, nez, anus, parties génitales…). Elles sont souvent le signe d’une dermatose grave. | Brûlures Dermatose allergique de contact Réaction médicamenteuse Maladies auto-immunes : – Pemphigoïde bulleuse – Pemphigus vulgaire | |
Pustules : | Lésions surélevées, de taille variable, contenant des sérosités suspectes blanchâtres ou jaunâtres voire du pus. | Pustules folliculaires : folliculites bactériennes Pustules non folliculaires : Psoriasis pustuleux, maladie de Behçet… |
Causes fréquentes et facteurs sous-jacents :
Les causes des lésions cutanées sont variées et dépendent de la nature de la lésion. Il peut s’agir de cicatrices résultant d’un traumatisme, de plaques liées à des affections comme le psoriasis ou encore de grains de beauté suspects, de vésicules herpétiques ou de tumeurs cutanées…
Les lésions cutanées peuvent être d’origine infectieuse, inflammatoire, auto-immunes, allergiques, traumatiques ou systémiques.
Causes infectieuses :
On recense les causes :
- Bactériennes : Impétigo, folliculite …
- Virales : Herpès, zona, molluscum contagiosum.
- Fongiques : Teignes, candidoses, dermatophytoses.
Causes inflammatoires et auto-immunes :
On retrouve le psoriasis, le lupus érythémateux, la dermatite atopique.
Causes allergiques :
Les plus fréquemment rencontrés sont l’urticaire, l’eczéma de contact et les hypersensibilités médicamenteuses.
Causes traumatiques ou systémiques :
Elles sont principalement dues à un traumatisme mécanique (choc, coupure), thermique (brûlure), électrique (électrocution), chimique… mais on retrouve aussi les ulcères de pression, les complications du diabète, les cicatrices…
À noter que les ulcérations et taches cutanées sont souvent liées à des affections sous-jacentes, qu’il faut déterminer.
Quand et pourquoi référer à un dermatologue :
Critères d’urgence :
En cas de lésions évolutives, douloureuses ou associées à des signes systémiques (fièvre, lymphadénopathie), il est impératif de collaborer étroitement avec un dermatologue, et de lui transmettre les informations nécessaires à la prise en charge ou au suivi.
Cas complexes nécessitant un spécialiste :
De la même manière, certaines lésions nécessitent de consulter un spécialiste, dont :
- les lésions atypiques ou résistantes aux traitements habituels.
- une suspicion de malignité (mélanome, carcinome basocellulaire).
Guidelines pour référer efficacement :
Dans le cadre de votre collaboration avec le dermatologue, et pour assurer la coordination et la sécurité des soins, vous devez transmettre les données essentielles à la prise en charge : motif d’adressage précis, compte rendu de la consultation initiale (recueil de données), photos, traitements actuels et terminés, examens réalisés…
Prise en charge initiale des lésions cutanées :
Gestion immédiate en cabinet :
En premier lieu, il est nécessaire de procéder à :
- Un nettoyage doux des lésions.
- Une application topique : antiseptiques, hydratants ou antibiotiques en fonction du type de lésions.
Traitements médicamenteux courants :
Ensuite, en fonction de l’état cutané et de la lésion, plusieurs traitements pourront être mis en place, comme :
- Crèmes corticostéroïdes pour les lésions inflammatoires.
- Antihistaminiques pour les réactions allergiques.
- Antiviraux/antifongiques pour les infections spécifiques…
La dermatochirurgie :
Il s’agit d’une intervention chirurgicale destinée à traiter les lésions cutanées et sous-cutanées. Elle varie en fonction du type de lésion, de sa gravité, de sa localisation et de la demande du patient.
Les lésions cutanées bénignes :
Dans le cadre des lésions bénignes, elle est surtout indiquée en cas de perturbation fonctionnelle, d’inconfort ou si la lésion est inesthétique : kyste palpébral, cicatrice disgracieuse sur le visage…
Les lésions cutanées malignes :
L’exérèse :
Dans ce cas, l’exérèse chirurgicale est impérative et doit inclure une marge de sécurité, dont la taille dépend du type de lésion.
L’exérèse doit permettre d’enlever toutes les cellules cancéreuses, d’empêcher qu’elles prolifèrent et ainsi prévenir les récidives.
La biopsie-exérèse permet aussi d’analyser la lésion.
Le dermatologue confirme le diagnostic, planifie l’intervention, et assure le suivi dermatologique à long terme. Le médecin traitant fait toutefois le lien.
La reconstruction :
Elle permet de restaurer la zone traitée afin qu’elle soit la plus esthétique et fonctionnelle possible. Une coordination avec le médecin traitant est nécessaire pour que le suivi post-opératoire se fasse dans les meilleures conditions.
Suivi et conseils aux patients :
Il est également capital d’informer les patients sur les risques et les signes d’aggravation afin qu’ils consultent rapidement.
Prévention et éducation pour les patients :
Recommandations simples :
Les gestes simples à adopter au quotidien pour éviter l’aggravation des lésions sont :
- La protection adaptée des lésions contre le soleil.
- La limitation de l’exposition au soleil entre 11h et 15h, notamment en prévention des carcinomes.
- L’exclusion des irritants et allergènes connus (produits ménagers, textiles).
- Le nettoyage doux des lésions.
L’éducation du patient :
L’éducation du patient est essentielle pour prévenir les complications et repérer les signes d’alerte.
Elle repose sur :
- L’apprentissage de l’autosurveillance des lésions suspectes, avec notamment la règle ABCDE.
- Les conseils pour éviter les récidives (eczéma, infections fongiques).
Pour conclure...
Vous l’aurez compris, il est primordial d’identifier correctement et rapidement les lésions cutanées, et leurs causes, afin que la prise en charge initiale soit efficace.
En fonction du type de lésions, vous initiez un traitement.
Pour éviter tout retard de diagnostic, en cas de doute, vous adressez votre patient à un confrère spécialisé en dermatologie, à qui vous référez les données clés, et avec qui vous collaborez étroitement tout au long du traitement et du suivi.
Si la prise en charge des affections cutanées vous intéresse mais que vous ne vous sentez pas à l’aise avec leur diagnostic ou leur traitement, n’hésitez pas à compléter votre formation initiale : différentes actions de DPC dédiées à la dermatologie sont disponibles.
Pour conclure, avez des questions au sujet des lésions ?
Quels types de lésions rencontrez-vous le plus souvent au cabinet ?
Avez-vous des anecdotes à partager au sujet de cas cliniques qui vous ont marqué ?
Enfin, si vous avez trouvé cet article utile, vous pouvez le partager autour de vous.
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