L’essentiel en un coup d’œil :
Le dépistage organisé débute à 50 ans : Recommandé tous les deux ans jusqu’à 74 ans pour les femmes à risque moyen, il est pris en charge à 100 % et repose sur une double lecture systématique pour plus de fiabilité.
Avant 50 ans, c’est au cas par cas : Aucun dépistage systématique n’est conseillé, sauf symptômes ou risque élevé (mutation BRCA, antécédents familiaux ou irradiation thoracique). L’IRM et la mammographie annuelle débutent alors dès 30 ans.
Après 74 ans, place à l’individualisation : La décision repose sur l’état de santé général, l’espérance de vie et les bénéfices attendus d’un traitement éventuel.
Informer sans dramatiser : Le médecin généraliste joue un rôle clé : rassurer sur la douleur, expliquer les bénéfices, relativiser les risques (faux positifs, irradiation) et encourager une décision éclairée.
Un dialogue déterminant pour l’adhésion : La relation médecin-patiente fonde la réussite du dépistage, notamment pour repérer les femmes éligibles, gérer les inquiétudes et coordonner le suivi.
Le saviez-vous ?
Le cancer du sein est le cancer féminin le plus fréquent en France. Malgré les avancées thérapeutiques et la mise en place du dépistage organisé (DO), plus d’une femme sur deux ne participe pas au programme national.
Peur du résultat, appréhension de la douleur, sentiment d’être trop jeune ou trop âgée pour être concernée… Les raisons sont multiples, souvent mêlées à un manque d’informations ou d’accès au service.
Pourtant, détecté tôt, le taux de survie à 5 ans avec un cancer du sein est aujourd’hui de 88 %.
La mammographie est l’examen de référence pour identifier les anomalies avant même qu’elles ne soient palpables.
Mais entre les recommandations, les risques, les exceptions, et les inquiétudes des patientes, une question revient sans cesse : « à quel âge faut-il vraiment commencer le dépistage ? ».
C’est ce à quoi nous répondrons aujourd’hui, en nous basant sur les dernières recommandations, et sur le rôle clé du médecin généraliste, au cœur du dépistage éclairé.
Qu’est-ce qu’une mammographie ?
Définition et objectif
La mammographie est une radiographie des seins réalisée à l’aide de rayons X de faible intensité. Elle permet de détecter précocement des anomalies invisibles à la palpation : nodules, microcalcifications ou déformation du tissu mammaire.
On distingue :
- La mammographie de dépistage, pratiquée chez des femmes asymptomatiques, dans une logique préventive.
- La mammographie diagnostique, prescrite en présence de signes cliniques : nodule palpable, écoulement, douleur localisée…
Modalités
L’examen dure entre 10 et 15 minutes. Chaque sein est positionné et légèrement comprimé pendant quelques secondes le temps de réaliser les clichés : en général, deux incidences sous deux angles différents. Cette compression peut entraîner une gêne mais elle est brève et nécessaire pour la qualité des images. Les résultats sont transmis à la patiente et à son médecin.
Les questions à répondre :
Est-ce douloureux ? Une légère gêne peut être ressentie pendant quelques secondes, le temps de réaliser le cliché.
Dois-je retirer les bijoux ? Oui, s’ils se trouvent sur le thorax.
Combien de clichés sont réalisés ? En général, deux clichés par sein.
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Dépistage organisé (50–74 ans)
Recommandations
Le programme national de dépistage organisé s’adresse aux femmes âgées de 50 à 74 ans, sans facteur de risque particulier.
La mammographie doit être réalisée tous les deux ans.
Elle est prise en charge à 100 % par l’Assurance maladie, et bénéficie d’une double lecture par deux radiologues agréés.
Justification
C’est à partir de 50 ans que :
- Le risque de cancer du sein augmente significativement.
- Le rapport bénéfices/risques du dépistage est le plus favorable.
- La densité mammaire diminue, notamment après la ménopause, ce qui facilite la lecture des images.
Tableau : Comparaison dépistage organisé vs individuel
Critère : | Dépistage organisé | Dépistage individuel |
Population | 50-74 ans, risque moyen | Avant 50 ans ou hors protocole. |
Fréquence | Tous les deux ans | Au cas par cas selon profil. |
Prise en charge | 100 % sans avance de frais | Variable. |
Double lecture | Oui | Plus rarement. |
Mammographie avant 50 ans
Population générale
Selon la Haute Autorité de Santé, aucun dépistage systématique n’est conseillé avant 50 ans chez les femmes à risque moyen.
Une mammographie peut toutefois être proposée :
- en présence de symptômes mammaires ;
- sur avis médical, en fonction des antécédents personnels et familiaux.
La question d’un dépistage plus précoce reste discutée, parce que si l’âge moyen de diagnostic se situe autour de 64 ans, 1 cancer sur 6 concerne les moins de 50 ans, et il est souvent plus agressif dans cette tranche d’âge. Certains praticiens préconisent une surveillance plus étroite à partir de 40 ans, mais toujours dans le cadre d’une décision partagée.
Femmes à haut risque
Le dépistage précoce est recommandé chez :
- Les femmes porteuses d’une mutation BRCA1 ou BRCA2, ou issue d’une famille à haut risque génétique.
- Celles ayant subi une irradiation thoracique (ex. maladie de Hodgkin).
- Celles avec plusieurs antécédents familiaux précoces(avant 50 ans).
Dans ce cas, les recommandations officielles sont de pratiquer une IRM annuelle dès 30 ans et une mammographie annuelle à partir de 30 à 35 ans.
Spécificités : | Recommandations :
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Risque élevé | Début de la surveillance 5 ans avant l’âge auquel le cancer a été diagnostiqué chez le parent le plus jeune.
Mammographie annuelle, à partir de 30 ans (plus tôt au cas par cas).
Le nombre de clichés est limité avant l’âge de 30 ans, pour limiter l’irradiation.
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Antécédents personnels de cancer
| Mammographie annuelle, sans limite d’âge. |
Autres antécédents (hyperplasie atypique par exemple) | Mammographie annuelle ou tous les deux ans, en alternance avec une échographie et/ou une IRM jusqu’à l’âge de 40 ans.
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À retenir :
Un dépistage anticipé peut induire des :
- Faux positifs fréquents.
- Surdiagnostics et biopsies parfois inutiles.
- Irradiations cumulatives légèrement plus importantes.
Ces éléments doivent être clairement expliqués à la patiente.
Le médecin doit informer avec justesse, sans minimiser ni dramatiser, et décider avec la patiente de la stratégie la plus adaptée : le dépistage doit toujours être personnalisé et éclairé.
Mammographie après 74 ans
Au-delà de 74 ans, le dépistage systématique n’est plus recommandé bien que le risque de cancer existe toujours.
La décision d’un dépistage repose alors sur :
- L’état général.
- L’espérance de vie (>10 ans).
- Les bénéfices attendus d’un éventuel traitement.
En présence d’un symptôme clinique (nodule, grosseur, ganglion, voussure, déformation, ulcération, écoulement au niveau du mamelon…), la mammographie doit être réalisée, quel que soit l’âge.
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Bénéfices et limites du dépistage
Les études internationales et les données de Santé publique France confirment que le dépistage organisé réduit la mortalité spécifique d’environ 20 % dans la population concernée.
Bénéfices :
| Limites : |
Détection précoce de cancers de petite taille, souvent curables.
Traitements moins agressifs et mieux tolérés.
| Irradiation modérée mais réelle (dose ~0,4 mSv par sein).
Faux positifs ou faux négatifs possibles.
Surdiagnostic estimé à 10-20 % des cancers dépistés.
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Le rôle du médecin est d’en informer clairement la patiente, en contextualisant les risques et en recherchant la participation éclairée.
Points à rappeler :
· Expliquer les bénéfices et les limites de la mammographie à chaque consultation. · Clarifier la distinction entre le dépistage et le diagnostic. · Encourager la participation au dépistage organisé. |
Fréquence et suivi après mammographie
- Si le résultat de la mammographie est normal → rappel automatique tous les 2 ans.
- En cas d’anomalies ou de doute → examens complémentaires (échographie, biopsie).
- En présence de seins denses → mammographie standard, puis contrôle échographique pour améliorer la sensibilité.
Même en dehors du dépistage, l’examen clinique régulier reste indispensable.
Arbre décisionnel simplifié
Tranches d’âge | Facteurs de risque | Actions recommandées |
25-49 ans | Risque faible. | Surveillance clinique régulière. |
25-49 ans | Haut risque (BRCA, antécédent familial). | IRM + mammographie annuelle. |
50-74 ans | Risque moyen. | Dépistage organisé tous les deux ans. |
> 74 ans | Tous. | Décision individualisée, suivi personnalisé. |
Rôle du médecin traitant
Le médecin généraliste occupe une place centrale dans la stratégie de dépistage du cancer du sein :
- Il sensibilise, informe et accompagne les femmes tout au long de leur parcours de prévention.
- Il identifie les femmes à risque élevé pour les orienter vers une consultation d’oncogénétique ou une prise en charge spécialisée.
- Il gère les inquiétudes liées à l’attente ou à la peur du résultat.
- Il coordonne le suivi après le dépistage, et planifie les futurs rendez-vous.
Dans son guide de 2023 destiné aux médecins généralistes, la HAS insiste sur l’importance d’un dialogue bienveillant, d’une information claire sur les bénéfices/risques et d’une approche personnalisée.
Parce qu’au-delà des chiffres et des protocoles, c’est sa relation de confiance avec la patiente qui conditionne l’adhésion au dépistage.
FAQ – questions fréquentes
Quand faire une mammographie si mutation BRCA ?
Surveillance annuelle dès 30 ans : IRM et mammographie alternées, parfois plus tôt selon l’âge du cancer familial le plus précoce.
Que faire si la patiente a un sein dense ?
La mammographie reste l’examen de référence, mais une échographie peut être proposée pour affiner la lecture.
À quelle fréquence si résultat normal ?
Tous les deux ans dans le cadre du dépistage organisé, avec un examen clinique annuel intermédiaire.
Quels examens complémentaires, et quand ?
Échographie en cas de seins denses ou d’anomalie palpable ; IRM réservée aux femmes à haut risque ; biopsie si lésion suspecte.
Comment rassurer les patientes anxieuses ?
Par une information claire et bienveillante : expliquer le déroulement du dépistage, ses bénéfices, et relativiser les situations de faux positifs.
Pour conclure...
Entre 50 et 74 ans, la mammographie reste le pilier du dépistage organisé, à raison d’un examen tous les deux ans.
Avant 50 ans ou après 74 ans, la décision relève d’une évaluation individualisée, menée dans le cadre d’un échange éclairé entre le médecin et sa patiente.
Dans ce parcours, le médecin généraliste tient une place essentielle.
C’est lui qui informe, rassure et oriente.
Il accompagne les femmes hésitantes, repère celles qui échappent encore au dépistage, et adapte la surveillance selon le profil de risque.
Il est à la fois acteur de santé publique et partenaire de soins, garant d’une prévention humaine, accessible et personnalisée. Un rôle exigeant qui demande écoute et engagement.
Et vous, comment percevez-vous votre place dans cette mission de dépistage ?
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